Pourriez-vous nous faire un historique de votre organisme ?

Le Centre de Transfusion Sanguine des Armées « Jean Julliard » est un organisme du service de santé des armées (SSA) créé en 1945 et placé sous l’autorité du ministre des armées.

Quelles sont les missions, l’organisation et le fonctionnement du CTSA ?

La principale mission du Centre de Transfusion Sanguine des Armées (CTSA), est le soutien transfusionnel des forces lors d’engagements opérationnels et celui des Hôpitaux d’Instruction des Armées (HIA) implantés en région parisienne et PACA. Le CTSA assure également l’ensemble de la chaine transfusionnelle. Nous collectons, préparons, qualifions, conservons, distribuons, délivrons les différents produits sanguins labiles mais aussi assurons la production spécifique du plasma lyophilisé (PLYO), plasma universel ou des médicaments de thérapie innovante. Nous développons différentes activités comme, le dispensaire de soins, la thérapie cellulaire et tissulaire, la production de médicament de thérapie innovante et menons des activités thérapeutiques et de recherche dans le cadre de la médecine régénérative.

Pour assurer notre mission principale sur l’ensemble du territoire français, le CTSA est constitué d’une structure centrale située à Clamart à proximité de l’hôpital d’instruction des armées Percy, trauma center de niveau 1 et de son centre de traitement des brûlés et d’un site secondaire à Toulon au sein de l’hôpital d’instruction des armées Sainte-Anne.

Quel est l’impact des opérations extérieures sur votre fonctionnement et votre organisation ?

En opérations extérieures, le CTSA assure le ravitaillement des forces armées en Produits sanguins labiles (PSL) sous 2 formes : les concentrés de globules rouges (CGR) et le plasma lyophilisé (PLYO). Ces ravitaillements sont organisés en routine et en urgence.

De manière systématique, toutes les trois semaines, la direction des approvisionnements en produits de santé des armées (DAPSA) organise au profit des forces en OPEX une dotation en CGR pour le renouvellement du stock arrivé à péremption. La DAPSA se charge de l’organisation logistique (réservation du vol et transport des caisses de sang du CTSA vers l’avion). Le CTSA est chargé du conditionnement des caisses : les produits sanguins y sont distribués selon une répartition en groupes sanguins préétablie en fonction des règles de compatibilité transfusionnelle, de la fréquence des groupes sanguins dans la population soutenue, du nombre à soutenir et du risque attendu.

Le pharmacien ou le médecin réanimateur en OPEX peuvent adresser une demande exceptionnelle en cas d’urgence. Le CTSA est alors organisé pour pouvoir mettre les PSL à disposition de la plateforme de transport en moins de 3 heures.

Quel est l’impact du COVID-19 sur votre activité ?

Dans le contexte de l’épidémie de Covid-19, les collectes de sang du CTSA se poursuivent afin d’assurer le soutien transfusionnel au profit des militaires en opérations et des malades au sein des HIA. Pour cela nous avons dû nous réorganiser pour prendre les mesures barrière d’hygiène nécessaires et ainsi éviter les risques de transmission du virus auprès des donneurs et de son personnel. Les espaces ont été aménagés de manière à ce que les personnes présentes sur le site ne puissent pas se croiser et des consignes strictes ont été mises en place :

  • Le port du masque est obligatoire pour le personnel du CTSA.
  • Le lavage des mains est obligatoire avant et après le don.
  • Une distance de sécurité d’au moins un mètre est à respecter.
  • Les consignes de préconisation sont rappelées auprès de chaque donneur.

Nous avons également mis en place, ctsa.reservio.com, une plateforme de rendez-vous en ligne, pour renforcer le respect des gestes barrières et bénéficier du meilleur accueil. Ainsi les donneurs peuvent, programmer leur venue en fonction des collectes mobiles ou en site fixe.

Quels types de dons collectez-vous ? Où peut-on donner ?

Sauver la vie d’un seul blessé peut nécessiter la transfusion de plusieurs poches de produits sanguins (concentrés de globules rouges, plaquettes et plasma). Pour faire face aux besoins hospitaliers et opérationnels, le CTSA doit collecter de nombreuses poches de sang, plasma et plaquettes chaque semaine. Les donneurs qui souhaitent donner en sang total ou aphérèse peuvent se rendre du lundi au jeudi de 8h30 à 16h30 et le vendredi de 8h30 à 15h30 sur le site de Clamart et de Toulon ou en se rendant sur le site ctsa.reservio.com pour trouver la collecte la plus proche de chez eux. Il est possible de donner du plasma et des plaquettes par aphérèse sur les collectes mobiles.

Qu’est-ce que le PLYO, spécificité du CTSA ?

Le PLYO ou plasma lyophilisé, est un produit sanguin labile exclusivement préparé par le CTSA essentiellement pour les besoins des armées. Il est le plasma idéal du traitement très précoce des troubles de coagulation du blessé hémorragique grave. Son atout : il est la référence dans la prise en charge immédiate du blessé hémorragique grave en secteur militaire et civil, car il est le seul plasma à pouvoir être disponible sans délai, en tout temps, tout lieu et toute circonstance. Cette  transfusion très précoce de plasma permet de lutter contre la coagulopathie et l’endothéliopathie (propriétés anti-inflammatoires et réparatrices de l’endothélium vasculaire) par l’apport de facteurs de coagulation. Il est aussi utilisé en cas d’altération de l’endothélium vasculaire (infection à virus type EBOLA, hémorragie de la délivrance).

Universel (quel que soit le groupe sanguin du receveur) il est reconstitué en moins de 6 minutes. Il se conserve à température ambiante. Son efficacité a pu être contrôlée jusqu’à 50°C par période de 6 heures à 9 heures pendant 9 mois et jusqu’à 38°C (sous tente) pendant 3 mois. Pour un  stockage long, le PLYO doit être conservé entre +2 et +6°C.

Quel est le parcours de la poche de sang ?

Pour sauver des vies, il faut collecter, traiter, conditionner et acheminer des produits sanguins vers les théâtres d’opérations extérieures et les HIA.

Une fois la poche de sang collectée, c’est le service de « préparation » qui récupère les dons et procède à la transformation des prélèvements en produits sanguins labiles (PSL). Les principales opérations effectuées sur le sang, permettent de séparer les produits sanguins en différents composants globules rouges, plasmas, plaquettes, afin de transfuser uniquement les produits sanguins nécessaires au receveur et de pouvoir conserver plus longtemps les produits isolés.

Lorsque les éléments sanguins sont séparés, ils sont conservés à température dirigée en chambre froide en attente de qualification biologique du don par le laboratoire du CTSA. Après avoir effectué des analyses sur les tubes d’échantillons visant à assurer sa qualité et suivre les produits sanguins labiles, les poches de sang sont ensuite transmises au laboratoire de distribution-délivrance, afin qu’elles soient acheminées en HIA et en opérations extérieures pour être transfusées.

Quels liens avez-vous avec l’EFS ?

L’Etablissement Français du Sang et le CTSA sont riches d’une histoire commune et d’un long passé de collaboration. Depuis quelques années, notre collaboration s’est développée. Elle a été formalisée par un accord cadre dans lequel nos deux parties s’engagent à assurer l’autosuffisance en produits sanguins pour les patients français devant être transfusés, qu’ils soient civils ou militaires et de très nombreuses conventions.

Aujourd’hui, afin d’assurer une meilleure utilisation des ressources et des moyens dans le domaine des PSL et des produits issus du corps humains, la collaboration entre nos deux entités a été renforcée, notamment dans les situations de crise. Ainsi, le décret sang stipule que l’EFS fournit les PSL indispensables aux besoins des armées si le CTSA se trouve en difficulté pour le faire et vice versa le CTSA cède des PSL à l’EFS plutôt que de les périmer. Dans des circonstances exceptionnelles, le CTSA peut contribuer au plan de continuité de l’activité de l’EFS.

La collaboration entre le CTSA et l’EFS revêt une importance particulière concernant le champ réglementaire. En effet, certaines propositions faites à la tutelle par notre établissement sur notre organisation ou nos pratiques peuvent avoir des conséquences imprévues sur celles du CTSA, et réciproquement. Les échanges d’informations et les réunions entre nos deux institutions préparatoires sont donc essentiels.


Entretien avec la directrice du Centre de Transfusion Sanguine des Armées (CTSA) – le Médecin Général (MG) Eliane GARRABE